1793




 

Parodie sur la complainte de Louis Capet

chansons des rues dédiées aux vrais républicains, choisies et chantées par les citoyens Bellerose et Bien Aimé, son cousin, chanteurs sur le Pont au Change, seuls renommés pour les belles ariettes.


air de : Pauvre Jacques



O bon peuple que n'a-t-il donc pas fait,
Ce roi sans vertus, sans justice
Parjure ingrat qui vous fit son jouet
Il méritait bien son supplice. (bis)

Dans une cour infâme et lointaine
Français il a pris la naissance
Et des forfaits que nous connaissons tous
Ont environné son enfance.

A son hymen la France avec effroi
Du Ciel remarqua la colère ;
Et le flambeau de l'hymen de son roi
Fut une torche funéraire.

O bon peuple que n'a-t-il donc pas fait,
Ce roi sans vertus, sans justice
Parjure ingrat qui vous fit son jouet
Il méritait bien son supplice. (bis)

Monté sans gloire à ce trône éclatant
Il y traina sa longue enfance
Dans les cahots d'un état chancelant
Qui courrait à la décadence.

O bon peuple s'il avait hérité
De nos fureurs et de nos peines
Eut-il frémi lorsque la liberté
Vint briser nos antiques chaînes. (bis)

Sous ton seul nom, les ministres cent fois
Ont fait le malheur des familles ;
Et quand le peuple a repris tous ses droits
N'a-t-il pas vidé les bastilles ?

O bon peuple que n'a-t-il donc pas fait,
Ce roi sans vertus, sans justice
Parjure ingrat qui vous fit son jouet
Il méritait bien son supplice. (bis)

Henri fut bon quoiqu'un peu libertin,
Nous lui pardonnons ses faiblesses ;
Mais prince ivrogne et princesse catin
Font plus de mal que cent maîtresses.

O bon peuple s'il avait hérité
De nos fureurs et de nos peines
Eut-il frémi lorsque la liberté
Vint briser nos antiques chaînes. (bis)

Tu veux les voir ceux qu'ont tués tes mains
Tes deux palais, Avignon, Nîmes,
Nos bois, nos champs, nos villes, nos chemins,
Sont tous couverts de tes victimes.

O bon peuple que n'a-t-il donc pas fait,
Ce roi sans vertus, sans justice
Parjure ingrat qui vous fit son jouet
Il méritait bien son supplice. (bis)

Vois-tu rugir cette meute de rois
Tes frères, tes lâches complices ?
De note sang avides, à ta voix,
Ils s'y baignent avec délices.

O bon peuple s'il avait hérité
De nos fureurs et de nos peines
Eut-il frémi lorsque la liberté
Vint briser nos antiques chaînes. (bis)

Pleure Louis, à l'heure de ta mort,
D'avoir désolé la patrie,
Tous les Français pourront long-temps encor
Pleurer les crimes de ta vie.

O bon peuple frappe et détourne les yeux
Il a trop mérité sa peine
Un roi parjure est l'opprobe des Cieux
Et la terre lui doit sa haine.

BHVP n° 18149 - Clé du caveau n° 444

Cette chanson est chantée après l'exécution du roi. Louis XVI est arrivé sur le trône car ses frères ainés sont décédés. Il est le successeur quand Louis XV meurt. Louis XVI n'a pas été éduqué pour être roi. Cela se ressent dans sa manière de gouverner. S'il est intelligent, il manque de fermeté, d'envergure, et il est facilement influençable.
Dans cette chanson, la reine n'intervient pas. Louis XVI est présenté comme le seul responsable.




 
La marmotte en vie

paroles et musique de : Ducray-Duminil


J'ai quitté la montagne
Où je naquis jadis
Pour courir la campagne
Et venir à Paris.
Ah ! voyais donc la marmotte,
La marmotte en vie,
Ah ! donnais queuqu'chose à Javotte
Pour sa marmotte en vie. (ter)

De village en village
Je m'en allai tout droé
Portant petit bagage,
Criant dans chaque endroé :
Ah ! voyais donc la marmotte,
La marmotte en vie,
Donnais queuqu'chose à Javotte,
Pour sa marmotte en vie.
Ah ! voulais-vous voir la marmotte,
La marmotte en vie,
Ah ! donnait queuqu'chose à Javotte
Pour sa marmotte en vie.

Quand je fus à la barrière,
Un commis m'arrêta
M'disant jeune étrangère
Que portez-vous donc là ?
Ah ! monsieur c'est la marmotte,
La marmotte en vie,
Donnais queuqu'chose à Javotte,
Pour sa marmotte en vie.
Ah ! voulais-vous voir la marmotte,
La marmotte en vie,
Ah ! donnait queuqu'chose à Javotte
Pour sa marmotte en vie.

Passais, la jeune fille
Avec ce petit bien
Quand on est si gentille
Au Roé l'on ne doit rien
Allais criai la marmotte
La marmotte en vie,
D'mandais queuqu'chose pour Javotte,
Pour sa marmotte en vie.
Ah ! voulais-vous voir la marmotte,
La marmotte en vie,
Ah ! donnait queuqu'chose à Javotte
Pour sa marmotte en vie.

Un beau monsieur me r'garde
Puis s'arrête tout doux,
"La belle Savoyarde
"Montre moi tes bijoux ?
"Ah ! voyons donc c'te marmotte
"C'te marmotte en vie,
"J'donnerai queuqu'chose à Javotte
"Pour sa marmotte en vie,
"Ah ! montre-moi ta marmotte
"Ta marmotte en vie,
"Oui, j'donn'rai queuqu'chose à Javotte
"Pour sa marmotte en vie."

Moi, sans plus de mystère
Soudain le satisfis :
Il ouvr'son aumonière
Puis comptant ses Louis
"Ah ! prête-moi ta marmotte
"Ta marmotte en vie,
"J'donnerai tout c't'or à Javotte
"Pour sa marmotte en vie
"Ah ! prête-moi ta marmotte
"Ta marmotte en vie,
"Oui, j'donn'rai tout c't'or à Javotte
"Pour sa marmotte en vie."

Que faire, pauvre fille !
En voyant tant d'argent ...
D'aise mon cœur pétille,
J'accepte le présent ...
Prenais, prenais, la marmotte
La marmotte en vie ...
Donnais, donnais à Javotte
Pour sa marmotte en vie :
Ah ! caressais donc la marmotte,
La marmotte en vie,
Ah ! donnais, donnais à Javotte
Pour sa marmotte en vie.

Mais ce bien que regrette
Il me l'prit pour son or.
N'ai plus que la coffrette
Où gardais ce trésor.
Ah ! j'ai perdu la marmotte,
La marmotte en vie.
C'en est fait pauvre Javotte
D'la marmotte en vie.
Ah ! oui j'ai perdu la marmotte
La marmotte en vie,
C'en est fait pauvre Javotte
D'la marmotte en vie.

BHVP n° 135032

Javotte est Savoyarde. A cette époque la Savoie n'est pas française. La montagne est trop pauvre pour nourrir tous ses enfants et tous les ans des jeunes la quittent pour aller exercer des petits métiers à Paris. Ils emmènent avec eux une marmotte. Ils mendient en la faisant danser.
La ville est dure pour les jeunes filles, et la pauvre Javotte finit par y laisser sa vertu.




 
Chant patriotique
en bouts rimés, en réponse au chant soi disant républicain des rebelles de l'Eure et du Calvados.
à tous les bons Français


air de : La Marseillaise


Français il n'est plus de Neustrie
Ainsi l'ont décidé nos loix ;
La France c'est l'unique patrie
Dont il faut écouter la voix, (bis)
Des Normands on vante la gloire
J'en vois mille traits renaissants
Leur loi fut d'envahir nos champs.
Nous asservir fut leur victoire.
Buzot et Barbaroux,
Voilà les vrais brigands,
Français, Français,
Exterminez
Ces restes de Normands.

Dans leur faction parricide,
Trente et quelques petits tyrans,
Pour suivre un projet homicide,
Vont rendre nos foyers sanglants ; (bis)
Bon peuple tu deviens rebelle
Pour ceux qui trahissent tes droits,
La justice a rendu ses loix,
Le factieux fuit devant elle.
Buzot et Barbaroux,
Voilà les vrais brigands,
Français, Français,
Exterminez
Ces restes de Normands.

Ont-ils montré cette énergie
Qui ne peut supporter les rois ?
Non, ils aiment la tyrannie,
Pour eux, vous subissez ses lois, (bis)
Qu'importe le fier Robespierre ?
Un homme ne fait pas l'Etat,
Qu'importent Danton et Marat ?
C'est le cri de la France entière.
Buzot et Barbaroux,
Voilà les vrais brigands,
Français, Français,
Exterminez
Ces restes de Normands.

Paris, ville toujours superbe,
Poursuis ces serpens odieux,
Qui fuyent en rampant sous l'herbe
Puis lèvent un front orgueilleux, (bis)
Tu t'arme ... La France respire,
La faction pâlit d'effroi,
Et sous le glaive de la Loi
L'affreux fédéralisme expire.
Buzot et Barbaroux,
Voilà les vrais brigands,
Français, Français,
Exterminez
Ces restes de Normands.

Console-toi Sainte Patrie,
Il te reste sept cents vengeurs,
Des tyrans et de l'anarchie,
Leurs Décrets vont être vainqueurs (bis)
Complices de maintes victimes,
Les factieux seront punis,
En vain nos cruels ennemis
Auront salarié nos crimes.
Buzot et Barbaroux,
Voilà les vrais brigands,
Français, Français,
Exterminez
Ces restes de Normands.

Français, Nation bonne et fière,
Levez-vous, marchez vers le Nord ;
Ecrivez sur votre bannière :
AUX FEDERALISTES LA MORT ! (bis)
Et toi, Caen, ville hospitalière,
Chasse ces faux Représentants,
Aux bons Français reconnaissants,
Cette action sera bien chère.
Buzot et Barbaroux,
Voilà les vrais brigands,
Français, Français,
Exterminez
Ces restes de Normands.

BHVP n° 963255

En 1790, les anciennes provinces sont supprimées et la France est divisée en départements. En 1792, c'est la révolte fédéraliste, les départements de Normandie, de Bretagne, de Franche Comté, d'Aquitaine et de Provence se soulèvent contre la volonté centralisatrice des Montagnards. C'est-à-dire qu'il ne veulent pas que Paris ait tout le pouvoir. Les fédéralistes ne sont pas contre la Révolution, ils veulent que chaque region conserve le pouvoir pour ce qui la concerne directement. Buzot et Barbaroux sont des meneurs de cette révolte.



 
Conseils aux Sans-culottes ou, Remettez vos culottes

paroles de : Despréaux
air de : On doit soixante mille francs


Rhabillez-vous peuple françois
Ne donnez plus dans les excès
De nos faux patriotes ;
Ne croyez plus que d'être nu
Soit une preuve de vertu ;
Remettez vos culottes.

Distinguez donc l'homme de bien
Du paresseux et du vaurien,
Et des faux patriotes.
Peuple honnête et laborieux,
Ne vous déguisez plus en gueux ;
Remettez vos culottes.

Ne jugez jamais par l'habit
Du sot ou de l'homme d'esprit,
Ni des bons patriotes.
Bourgeois, rentiers, richards, marchands,
Feroient périr mille artisants
S'ils alloient sans culottes.

N'imitez plus, il en est temps,
Ces populaires charlatans
Pillant les patriotes.
Dieu fit l'industrie et les mains
Pour faire vivre les humains
Et gagner des culottes.

De l'homme soutenez les droits,
Mais sans désobéir aux loix,
Soyez bon patriotes.
Concitoyens, sans vous fâcher,
Cachez ce que l'on doit cacher :
Remettez vos culottes.

histoire chantée de la 1ère République. 1789 à 1799. Louis Damade, Paris, 1892



 
Un pain d'quatr'livres
par un chanteur des rues

air de : Nous n'avons plus qu'un temps à vivre


Nous n'avons plus qu'un pain d'quatr'livres
Femme mangeons le gaîment;
Quoi qu'il en soit pour not'vivre
Tâchons qu'il dure un peu longu'ment.

A la ville comme au village
Un chacun pens'au lendemain ;
Le plus fou passe pour un sage,
Lorsqu'il se réserve du pain.

refrain

    Nous n'avons plus qu'un pain d'quatr'livres
    Femme mangeons le gaîment;
    Quoi qu'il en soit pour not'vivre
    Tâchons qu'il dure un peu longu'ment.

Chassons loin de nous la chimère
On n'a pas toujours du fricot ;
Tu ne me réponds rien, ma chère,
Dis-moi, qu'en penses-tu Margot !

refrain

Va, prends mes guenill's et ta cotte
Et les port' au Mont de Piété ;
Demain nous ferons la ribotte,
Pour aujourd'hui ça fait raté.

La goguette ancienne et moderne, choix de chansons, 3ème édition, Paris, chez Garnier frères, libraires - Clé du caveau n° 408

Le pain est la base de l'alimentation. Son prix augmente tellement que les ouvriers ne peuvent plus en acheter. Un pain de quatre livres valait alors 12 sous quand le salaire journalier d'un ouvrier était de 20.
Le Mont de Piété est devenu le Crédit Municipal, qui existe toujours. C'est un organisme de prêt sur gages. On dépose des objets personnels contre une somme qu'il faut rembourser. Si le prêt n'est pas remboursé, on perd ce que l'on a déposé. Cette manière d'obtenir de l'argent est très ancienne. Déjà au moyen âge, les Juifs prêtaient de l'argent de cette façon, quand les gens du peuple avaient besoin d'argent en espèces, surtout pour payer leurs impôts.
En 1793, pour empêcher que des émeutes n'éclatent, la Convention fixe un prix maximum pour le pain.